Sans
parler de miracle, plusieurs protocoles de recherche déjà
appliqués à des Québécois atteints du
cancer de la prostate démontrent des rémissions
extraordinaires, a appris La Presse auprès
des chercheurs. L'un de ces patients, natif de l'Outaouais,
était pratiquement mourant quand il a été
dirigé vers le Dr Fred Saad, imminent uro-oncologue et chercheur
clinique au Centre hospitalier de l'Université de
Montréal (CHUM). Or, depuis qu'il reçoit le vaccin,
l'homme de 68 ans est en rémission.
«J'ai
suivi une radiothérapie il y a 12 ans, puis un traitement
aux hormones, mais les effets secondaires étaient
insupportables. J'ai donc choisi l'ablation des testicules. C'est un
traitement efficace, sauf qu'on a découvert des
métastases dans les glandes. C'est alors qu'on m'a
recommandé au Dr Saad, il y a un an. Depuis, je ne prends
plus aucune pilule, je ne ressens aucun effet secondaire et je suis
considéré comme en rémission», a
raconté le patient, qui a préféré garder
l'anonymat.
Le
vaccin anticancer diffère de ceux que l'on administre en
prévention du virus du papillome humain (VPH), de l'influenza ou
de la varicelle. On s'en sert plutôt pour traiter la maladie,
à raison de plusieurs doses, d'abord aux trois semaines, ensuite
aux trois mois. Les chercheurs prélèvent des cellules
immunitaires dans les tumeurs, qu'ils réimplantent chez les
malades dans l'espoir qu'elles se réveillent pour s'attaquer aux
tumeurs. Aux États-Unis, un vaccin a déjà
été autorisé sur le marché, mais pas au
Canada. Ici, ils sont administrés dans le cadre de protocoles de
recherche bien stricts.
«On
ne veut pas donner de faux espoirs aux gens atteints d'un cancer, mais
je vis d'espoir depuis 20 ans, dit le Dr Saad. Il y a des
miracles, mais ce n'est pas tout le monde qui peut bien répondre
au vaccin. Il faut bien cibler les patients en fonction de l'ADN,
c'est-à-dire des biomarqueurs. Et il faut comprendre que ces
traitements peuvent coûter jusqu'à 50 000$ par
année. Ça ne rendrait donc pas service de l'administrer
à quelqu'un chez qui il n'aurait aucun effet.»
50 patients reçoivent le vaccin
Le
Dr Saad suit de près une cinquantaine de patients qui
reçoivent le vaccin anticancer. Ces patients lui ont
été recommandés en dernier recours, quand tous les
autres traitements sont inefficaces et que des analyses
démontrent qu'ils pourraient bien répondre au vaccin. Ses
travaux sont reconnus mondialement, comme ceux de tous les chercheurs
dans le domaine au Québec, et il ira bientôt les
présenter au Japon. Le Dr Réjean Lapointe, qui a
organisé le symposium où se réunissent une
centaine de chercheurs cette semaine, estime que les découvertes
explosent depuis trois ou quatre ans en matière de vaccin.
«Je
ne dis pas que ce sera dans 5, 10 ou 15 ans, mais il ne fait aucun
doute qu'on pourra un jour contrôler, voire éradiquer le
cancer. On a changé notre approche. À ce chapitre, on
peut faire un parallèle avec le VIH. Les chercheurs ont fait des
percées majeures dans ce domaine quand ils ont
arrêté de chercher un vaccin. La trithérapie
s'attaque au virus de plusieurs façons. C'est la même
chose pour le cancer, même si on ne parle pas d'un virus. Il faut
y aller brique par brique, attaquer l'ennemi de toutes parts.»